26.08.2025
FONDATION FRANZ WEBER

50 ans de combat pour la nature et les animaux

Franz Weber fut un précurseur de la protection de la nature et des animaux. Avec ses campagnes, il a marqué l’histoire — en Suisse comme à l’étranger. À ses côtés, et toujours sur
un pied d’égalité, se trouvait son épouse Judith. C’est avec elle qu’il fonda, il y a 50 ans, la Fondation Franz Weber (FFW).

Du journaliste au défenseur de l’environnement — le tournant décisif de Franz Weber

Les années soixante. C’est l’époque des investissements et de la production enthousiastes, de la consommation insouciante et du tout-jetable, du bétonnage effréné. Il semble alors normal et justifié que même le plus haut sommet, la vallée la plus secrète ou la rive la plus charmante soient mis à disposition de l’homme, au service de sa quête de confort, de bien-être, de prestige et de profit.

C’est aussi le cas à Surlej, un hameau de la commune de Silvaplana en Haute-Engadine, dans le canton des Grisons.

Face à ce paysage d’une beauté presque surnaturelle, encore intacte, au bord du lac de Silvaplana, un consortium de promoteurs décide : « Ici, nous construirons une ville ! Une ville pour vingt-cinq mille habitants ! »

Il s’agit d’un projet de type « deuxième Saint-Moritz ». Parcelle après parcelle, les terres sont rachetées aux paysans. Dans les bureaux d’architectes, les plans de logements, supermarchés, cinémas et parkings de la future ville prennent forme. Les pelleteuses, bulldozers et grues débarquent. Le boom de la construction commence avec la réalisation du téléphérique du Corvatsch.

« Et du jour au lendemain, dans ce que le poète Friedrich Nietzsche appelait “le plus beau paysage du monde”, surgit “le parking le plus laid du monde” », se souviendra plus tard Franz Weber, évoquant le début de son combat.

Oui, Franz Weber, citoyen suisse et grand voyageur, alors journaliste à Paris, fut profondément bouleversé lorsqu’en octobre 1965, de retour d’Italie vers Paris, il découvrit sur la pente herbeuse de Surlej le parking du Corvatsch entouré d’un chaos de chantiers.

Ce jour-là – ou plutôt cette nuit-là – a marqué un tournant décisif dans la vie de Franz Weber. C’est au cœur de cette nuit qu’il a fait le serment de sauver le paysage lacustre de la Haute-Engadine. Il ne savait pas encore que cette décision marquerait le début d’un engagement de toute une vie.

Une première campagne victorieuse, suivie de centaines d’autres en Suisse et dans le monde

Franz Weber organisa une intense campagne médiatique et fonda l’association « Pro Surlej ». Grâce à elle, il collecta les fonds nécessaires, il acquit de nombreuses parcelles indispensables au projet de construction et y imposa une interdiction de construire à perpétuité. Par cette action inédite jusqu’alors, Franz Weber sauva le paysage lacustre de l’Engadine, célébré par Nietzsche et véritablement unique.

« Pro Surlej » marqua le début de centaines de campagnes menées pour sauver des animaux, des paysages et des monuments culturels.

« Comme la majorité des Suissesses et des Suisses, vous incarnez pour moi la protection de l’environnement dans son sens le plus large, bien avant que ce terme ne devienne populaire », écrivait l’ancien président de la Confédération Moritz Leuenberger à propos du plus célèbre défenseur de l’environnement de Suisse.

Pour sa part,  Jean Ziegler, ancien expert des droits humains de l’ONU, qualifiait Franz Weber de « l’un des plus grands et des plus importants Européens de notre temps ».

Judith Weber : l’épouse et partenaire à part entière

Après le sauvetage de Surlej, Franz Weber reçut des appels à l’aide du monde entier. En 1971, Judith Kreis entra dans sa vie. Elle rendait alors visite à des amis sur une ferme au bord du lac de Sempach. Par coïncidence, les paysans de la région avaient, le même jour, fait appel à Franz Weber — devenu célèbre après son intervention à Surlej — pour lutter contre le tracé destructeur d’un tronçon autoroutier entre Sempach et Sursee.

Parenthèse : grâce aux idées de Franz Weber et à sa campagne, le tracé a pu être modifié, incluant notamment deux tunnels. Cette « deuxième bataille de Sempach », comme il l’appelait, fut aussi le point de départ de sa première initiative populaire nationale : « Pour plus de démocratie dans la construction des routes nationales ».

Judith Weber fut dès lors aux côtés de l’écologiste. « Nous formions un couple amoureux et engagé, d’égal à égal », disait-elle. Ensemble, ils se sont battus — et ont gagné — contre la bretelle autoroutière prévue à Lausanne-Ouchy, pour la protection du Lavaux et pour la sauvegarde des Alpilles, près des Baux-de-Provence.

C’est grâce à Judith Weber que Franz devint aussi un défenseur des animaux. C’est elle qui l’a entraîné dans sa première campagne pour la protection animale : la lutte, encore aujourd’hui mondialement connue, contre le massacre brutal des bébés phoques au Canada. Elle l’accompagna lors de ses premiers voyages au Canada, codirigea la campagne, et surtout devint l’interlocutrice privilégiée de nombreuses chaînes de télévision — car Franz, contrairement à elle, ne parlait pas l’anglais.

Ainsi, au Canada et à New York, c’est Judith Weber, qui s’est trouvée au centre de l’attention médiatique. Des années plus tard, en Australie, c’est encore elle qui informa les médias du sauvetage de chevaux sauvages et qui mit en place le sanctuaire de Bonrook.

Mais en Europe, et en Suisse en particulier, le nom de Franz Weber était déjà devenu une marque, trop omniprésente pour laisser de la place à une Judith Weber « publique ».

Et pourtant, c’est ce partenariat discret mais puissant qui a conduit, il y a 50 ans, à la création de la Fondation Franz Weber.

Pro Surlej – point de départ

« Pro Surlej » est le point de départ de centaines de campagnes menées pour sauver des animaux, des paysages et des monuments culturels. Le hameau paisible de Surlej, peuplé d’une trentaine d’habitants, devait être transformé en ville de 25000 habitants. Franz Weber s’est opposé à ce projet destructeur et a lancé dès 1965 une immense campagne médiatique.

En parallèle, il a fondé l’association «Pro Surlej » dans le but de réunir les fonds nécessaires à une idée révolutionnaire : plutôt que de laisser les promoteurs acquérir les terrains clés pour la construction, c’est l’association elle-même qui allait les acheter, pour ensuite les placer sous interdiction de construire à perpétuité. 

Le plan réussit — notamment grâce à la soirée de gala organisée et animée par Franz Weber le 9 juin 1971 au Grand Hôtel Dolder de Zurich. De nombreuses personnalités, citoyens et responsables politiques — dont un conseiller fédéral — y participèrent, en soutien à ce paysage lacustre de l’Engadine chanté par Nietzsche.

Bilan de la soirée : une collecte de 500000 francs suisses en liquide, soit environ 1,5 million de francs en valeur actuelle.

Dans les semaines suivantes, ce montant fut encore doublé. Franz Weber obtint ainsi les moyens d’acheter les terrains visés.

Face à cette dynamique inattendue et portée par l’enthousiasme populaire, les autorités politiques du canton des Grisons instaurèrent une ordonnance de protection pour l’ensemble du paysage lacustre de l’Engadine.

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