29.09.2021
Alejandra Garcia

Equidad: comme un parfum de paradis…

Nos équipes ne chôment pas en Argentine, où le transfert de nos protégés entre leur ancienne demeure et leur nouveau refuge bat enfin son plein. Portés par l’enthousiasme et le bonheur de voir nos animaux goûter à leur nouvelle liberté, nos collaborateurs font fi des difficultés. Chaque jour, ils progressent davantage.

Leitmotiv
Pour certains, déménager est synonyme de conflits. Heureusement, ce n’est pas notre cas! Certes, organiser le transfert de nos protégés n’est pas une sinécure, mais notre équipe est si heureuse de voir que ses efforts portent leurs fruits qu’elle aborde chaque difficulté dans la joie et la bonne humeur. Nous sommes si proches du but! A chaque arrivée d’un nouvel animal, c’est la même émotion, la même satisfaction et la plus belle récompense à nos efforts. C’est cela qui nous porte et qui nous motive de plus belle.

Il faut les voir, ces êtres qui ont vécu l’enfer, découvrir pour la première fois de leur vie le plaisir de brouter, de
s’ébrouer dans tout l’espace qui leur est nécessaire, et retrouver leurs comportements instinctifs dans ce cadre paradisiaque, au coeur des montagnes. Ici, chaque nouveau stimulus est synonyme d’enrichissement. Pour des animaux qui ont passé leur vie dans l’insécurité et la peur de l’inconnu, cela n’a pas de prix. Et pour nous non plus!

Optimisation des ressources
Actuellement, ce sont 85 chevaux, 7 ânes et 8 vaches qui ont les premiers inauguré le nouveau terrain. Grâce à la
qualité des pâturages, la grande majorité d’entre eux n’a désormais plus besoin de luzerne pour se nourrir: l’herbe, présente en abondance et de bonne qualité, suffit à les maintenir en état. Seuls les individus les plus âgés dépendent encore de nous pour se nourrir. Outre le bien-être et la satisfaction que le fait de brouter procure à nos compagnons, le fait d’avoir un terrain aux dimensions adaptées à la taille de notre cheptel représente également pour nous une économie non négligeable en fourrage.

Dernière ligne droite
Pendant que les chevaux, les ânes et les vaches dĂ©jĂ  installĂ©s profitent de leur nouveau coin de paradis, nous continuons Ă  prĂ©parer nos rescapĂ©s qui se trouvent encore dans l’ancienne ferme. Il s’agit lĂ  principalement de se conformer aux exigences sanitaires officielles, obligatoires avant tout dĂ©placement d’animaux: en d’autres termes, il nous faut vacciner, vermifuger et rĂ©aliser des prises de sang sur tous nos protĂ©gĂ©s pour s’assurer de leur bonne santĂ©. Une fois ce contrĂ´le effectuĂ©, les certificats sont remis aux autoritĂ©s qui, après les avoir analysĂ©s, nous remettent les autorisations pour pouvoir enfin procĂ©der au transfert.

Ethologie
Une fois ces Ă©tapes franchies, il nous reste Ă  prĂ©parer nos fragiles protĂ©gĂ©s Ă  la perspective d’un long voyage et Ă  un changement d’environnement. Bien sĂ»r, ce changement de vie est pour leur bien, mais eux ne le savent pas. De fait, afin de mettre toutes les chances de notre cĂ´tĂ© pour que le pĂ©riple comporte le moins de stress possible pour eux, nous avons sollicitĂ© l’aide d’un expert en comportement Ă©quin, Monsieur David Castro. Ainsi, outre le Dr Gretel Castillo, vĂ©tĂ©rinaire avec qui nous travaillons depuis 8 ans pour assurer la santĂ© de nos chevaux, nos Ă©quidĂ©s pourront dĂ©sormais profiter de l’expertise de cet ancien entraĂ®neur, qui n’est autre que le reprĂ©sentant pour l’Argentine de la prestigieuse Haute École Nevzorov. RĂ©putĂ©e dans le monde entier, la mĂ©thode Nevzorov prĂ´ne la non-violence: elle consiste Ă  apprendre Ă  interagir avec le cheval par le biais de techniques et d’une Ă©ducation basĂ©es sur le jeu et la libertĂ© de mouvement de ce dernier. «J’Ă©tudie leur comportement en libertĂ© pour comprendre leurs besoins physiques et psychologiques et pour Ă©tablir non pas une relation de soumission et de violence, mais de sympathie et d’affection, pour qu’ils aient envie de faire des activitĂ©s avec nous, sans peur» rĂ©sume-t-il.

Après un premier séjour à Equidad afin d’aider les chevaux à s’adapter, il reviendra avant la fin de cette année pour former notre équipe et générer du matériel scientifique en éthologie équine.

Investissement
Une fois ces Ă©tapes passĂ©es, facilitĂ©es par le fait que nous avons divisĂ©s nos collaborateurs en deux groupes, l’un dans l’ancien sanctuaire, et l’autre au nouveau refuge, nous n’étions nĂ©anmoins pas au bout de nos peines. En effet, plusieurs problèmes logistiques demeuraient: trouver une entreprise de transport capable de traverser les routes de montagne escarpĂ©es jusqu’au nouveau sanctuaire en toute sĂ©curitĂ©, et rĂ©parer la route, très sinueuse, faite de terre et de pierres, que nous devions emprunter.

Après avoir constatĂ© qu’aucune entreprise de transport ne disposait de vĂ©hicules ou de chauffeurs adaptĂ©s Ă  nos besoins, nous primes la dĂ©cision d’acheter notre propre remorque. Cela nous offre une plus grande flexibilitĂ© pour programmer les transferts et nous permet d’entrainer les animaux Ă  embarquer. En outre, il s’agit d’un investissement qui nous permettra, Ă  l’avenir, de ne dĂ©pendre de personne et d’être plus rĂ©actifs si l’un de nos protĂ©gĂ©s venait Ă  tomber malade et devait ĂŞtre emmenĂ© en urgence Ă  la clinique Ă©quine la plus proche.

S’adapter au changement climatique
Une fois ces considĂ©rations rĂ©solues, de nouvelles difficultĂ©s se prĂ©sentèrent: une pĂ©riode de fortes prĂ©cipitations – chose qui ne s’Ă©tait pas produit dans la rĂ©gion depuis 20 ans – suivie d’une vague de froid polaire au cours de laquelle il a mĂŞme neigĂ©, nous tomba dessus. Ce froid sans prĂ©cĂ©dent provoqua le gel des pentes, d’oĂą provient notre approvisionnement en eau, et fit Ă©clater les tuyaux du rĂ©seau d’eau du sanctuaire, nous contraignant Ă  changer l’intĂ©gralitĂ© du système de plomberie afin de le rendre capable de rĂ©sister aux variations thermiques qui risquent de se multiplier du fait du changement climatique.

Enfin, pour couronner le tout, nous traversons actuellement une saison sèche et très venteuse avec un risque élevé de feux de forêt, ce qui contraint nos équipes à ouvrir des chemins dans la brousse avec notre BobCat afin de faciliter le passage des pompiers si cela devait s’avérer nécessaire.

Partenariats
Vous l’aurez compris, nos collaborateurs n’ont pas chĂ´mĂ©. Sans relâche, nos Ă©quipes travaillent 7 jours sur 7, sans aucun jour de repos, afin que le rĂŞve devienne rĂ©alitĂ© pour tous nos compagnons Ă  quatre pattes. De fait, afin de nous simplifier la vie et de ne plus trembler chaque nuit pour nos vies et celles de nos protĂ©gĂ©s restĂ©s dans l’ancien sanctuaire, – ce qui est absolument invivable au vu de tout ce que nous avons Ă  faire Ă  cĂ´tĂ© -, nous nous sommes rĂ©solus Ă  dĂ©lĂ©guer la gestion de la sĂ©curitĂ© pour ce site, et Ă  passer un contrat avec une sociĂ©tĂ© privĂ©e. Objectif: nous aider Ă  assurer la sĂ©curitĂ© de nos animaux et Ă©viter notamment que nos chevaux, très convoitĂ©s, soient volĂ©s. Nous nous fĂ©licitons de cette initiative: en Ă  peine 3 mois de service, les agents ont rĂ©ussi Ă  capturer puis Ă  remettre aux autoritĂ©s locales un intrus qui tentait de voler des chevaux.

Solidarité
Grâce à tout ce travail, le grand jour approche où nous pourrons enfin dire adieu à notre ancien sanctuaire pour profiter du nouveau. Mais nous gardons des projets pour notre ancien terrain dont nous souhaitons maintenir la vocation vertueuse! Nous avons ainsi fait le choix de conclure un partenariat avec la Fondation Sierra Dorada, un organisme qui fait un travail remarquable pour venir en aide aux orphelins et aux enfants victimes d’abus sexuels et de malnutrition. Afin de les aider à agrandir leur foyer d’accueil pour ces enfants qui ont connu l’enfer, nous avons décidé de leur faire don de notre ancien terrain.

Parallèlement, comme nous savons pertinemment que de nombreuses personnes continueront à abandonner des chiens à la porte de notre ancienne institution, nous avons développé un programme conjoint entre les deux fondations, afin que ces chiens soient pris en charge et protégés par les enfants de Sierra Dorada. Naturellement, nous contribuerons aux frais liés à leur alimentation et à leurs soins vétérinaires, et nous chercherons des familles adoptives pour chacun de ces chiens, mais nous pensons que ces petits êtres, qui ont en commun tant de souffrance et de rejet, pourrons se consoler mutuellement, qu’ils soient à deux ou quatre pattes.

En effet, tant à la FFW qu’à la Fondation Sierra Dorada, nous croyons que la violence envers les enfants et celle envers les animaux ont les mêmes origines sociales. C’est pour cela que nous collaborons depuis des années : soeurs de coeur et d’engagement, nos deux institutions luttent côte à côte depuis les premiers pas d’Equidad, afin de venir en aide aux plus démunis, qu’ils soient à deux ou quatre pattes.

Planter des «graines d’empathie» pour assurer l’avenir
Grâce Ă  ces valeurs communes et Ă  ce travail, chapeautĂ©s par la CoPPA (Coor-David Castro apprend Ă  Quimey Ă  reconnaĂ®tre et Ă  apprĂ©cier les plantes comestibles dont regorge le nouveau terrain. dinadora de Profesionales para la PrevenciĂłn de Abusos) et par l’UniversitĂ© catholique d’Australie, nous avons pu initier la conduite d’études scientifiques sur l’Ă©ducation Ă  l’empathie. Ce projet est fondamental, car il s’inscrit dans la continuitĂ© directe de ce que nous souhaitons accomplir au-delĂ  d’Equidad: Ă©duquer les gĂ©nĂ©rations futures Ă  l’empathie, Ă  travers ces enfants qui ont subi la violence et l’indiffĂ©rence dans leur propre chair, pour qu’à l’avenir, ni les foyers, ni les refuges n’aient plus de raison d’exister.

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