28.08.2024
Matthias Mast

Notre nature en danger

La Loi fédérale sur l’électricité (« acte modificateur unique ») était soutenue par le Conseil fédéral, le parlement, et surtout les milieux économiques, en particulier les fournisseurs d’électricité, à la recherche de profits – aux dépens de la nature en Suisse. La Fondation Franz Weber (FFW) a lancé le référendum contre cette loi néfaste et mené campagne pour informer le peuple suisse. La loi a malheureusement été approuvée, la nature en Suisse est donc en grand danger.

La Loi fédérale sur l’électricité (Loi pour un approvisionnement en électricité sûr, reposant sur des énergies renouvelables, ou “Mantelerlass”) avait été adoptée par le parlement en septembre 2023. Il fallait agir vite pour lancer le référendum : récolter 50’000 signatures en trois mois, pour que le peuple suisse puisse voter sur cet acte législatif aux graves conséquences. 

Cette loi, adoptée dans l’urgence et dans la peur d’un hypothétique «blackout», autorise des atteintes importantes et irrémédiables à la nature et au paysage – faisant fi, au passage, de la Constitution fédérale. Pire encore, elle constitue une menace pour notre système judiciaire, puisqu’une priorité quasi absolue est accordée à l’intérêt à produire de l’énergie – au détriment de la nature. Le contrôle par les tribunaux des projets de production d’énergie devient pratiquement inexistant, et notre démocratie est affaiblie, le Conseil fédéral pouvant décider d’abréger et de simplifier les procédures locales pour permettre, dans la hâte, la construction de nouvelles infrastructures de production d’énergie.

La question fondamentale qui se posait avant le vote était la suivante : dans un pays riche comme le nôtre, en passe d’acquérir internationalement une position dominante sur le plan technologique, ne peut-on pas assurer la transition énergétique sans détruire les derniers trésors de biodiversité ?

Apparemment, non… 

L’énergie éolienne et son pouvoir de destruction

Tout cela pour construire des parcs éoliens qui ne produisent pas de l’énergie de manière constante. Les éoliennes, en effet, restent immobiles trois à quatre jours par semaine ! De ce fait, le degré d’efficacité d’un parc se situe en moyenne entre 5 % et 8 %, et les éoliennes ont une durée de vie de sept à vingt ans…

Pour ce degré minime d’efficacité, les gens qui vivent dans un rayon d’un kilomètre de ces installations (qui peuvent atteindre 210 mètres de haut – deux fois la cathédrale de Berne) doivent supporter le bruit et l’effet d’ombre portée des pales de rotor, qui peuvent tourner jusqu’à 270 kilomètres heure.

C’est toutefois la nature qui souffre le plus de ces installations : chaque éolienne implique de dégager une surface de près d’un hectare. Autrement dit, pour chaque éolienne, il faut défricher et/ou déboiser une surface équivalente à une fois et demie celle d’un terrain de football. Une fois l’éolienne installée, on peut reboiser un tiers de cette aire, la surface restante – environ 4’600 mètres carrés – devant demeurer dégagée.

À cela s’ajoute le socle en béton. Pour chaque éolienne il faut évacuer dans les 7’000 tonnes de déblais afin de pouvoir ensuite couler jusqu’à 10’000 tonnes de béton armé dans le sol pour les fondations. Selon le lieu d’implantation et la nature du sous-sol il est parfois nécessaire de creuser jusqu’à 12 mètres de profondeur, ce qui représente dans les 1’400 trajets en camion par éolienne. Qui plus est, ce socle en béton armé est scellé une fois pour toutes. Son démantèlement (et l’évacuation du béton) est illusoire – cela sans même parler du désastreux bilan CO2 de toute l’opération.

Énergie solaire versus nature

Par ailleurs, il ne fait strictement aucun sens de construire des parcs solaires dans des zones de pâturages, plus spécifiquement sur nos Alpes, surtout si, en installant des panneaux photovoltaïques sur des infrastructures existantes (toits, murs, routes, etc.), on peut produire largement l’intégralité de nos besoins actuels – et même futurs – en électricité.

Qui plus est, les parcs solaires en montagne dégradent massivement notre nature. Les paysages suisses sont uniques au monde et constituent la carte de visite la plus précieuse de notre pays. Si nous recouvrons nos collines et nos montagnes encore intactes de panneaux solaires, nous détruirons irrémédiablement notre patrimoine et notre identité – tout comme la biodiversité. Inadmissible !

D’ailleurs, nous ne sommes pas les seuls à le penser : les autres grandes organisations de protection de la nature, qui avaient pourtant, bizarrement, décidé de soutenir la Loi sur l’électricité, font, elles aussi, opposition et recours contre les grands projets solaires – et même éoliens… C’est qu’au fond, nous savons tous que ces projets sont dévastateurs. Nos recours ont cependant désormais très peu de chances de succès.

Soutien à l’initiative biodiversité

La FFW prend les partisans de la loi au mot : lors de la campagne de votation, ils ont promis que 80% des installations de panneaux solaires seraient érigés sur des infrastructures existantes bien que la loi n’offre aucune garantie sur ce point. C’est en tout cas ce qu’a déclaré notamment le conseiller fédéral en charge du dossier, Albert Rösti. Ces promesses doivent être tenues !

C’est d’autant plus nécessaire que près d’un tiers des Suisses et des Suissesses ont rejeté la loi et manifesté ainsi leur fort attachement à la protection de la nature et du paysage. Fait notable : la loi sur l’électricité a été refusée par la majorité des citoyennes et citoyens des nombreuses communes concernées par des projets d’installations solaires ou éoliennes prévus ou déjà réalisés. «La FFW accepte bien évidemment le résultat de la votation », explique Vera Weber, présidente de la FFW, « mais prendra les partisans de la loi au mot. Il est inadmissible que des milliards soient dépensés pour détruire des espaces naturels. La protection de la nature, de la biodiversité et le respect de la démocratie directe doivent être préservés.»

La FFW poursuivra son action en faveur de la protection de la nature et soutient activement l’initiative sur la biodiversité sur laquelle nous voterons le 22 septembre prochain.

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