11.06.2024
Anna Zangger

Le Conseil fédéral autorise les tirs préventifs du loup

La Fondation Franz Weber prend position sur l’Ordonnance sur la chasse, estimant que la dernière révision viole la volonté populaire – et cet « abus » de pouvoir pourrait bien être le premier d’une longue série.

Chronologie

• 27 septembre 2020 : refus, par le peuple suisse (à 51,9%) de la révision de la Loi fédérale sur la chasse et la protection des mammifères et oiseaux sauvages (LChP), notamment pour éviter que les tirs préventifs (sans dommage effectif) des loups ne soient autorisés. La voix démocratique s’est exprimée : le loup ne doit être régulé que s’il présente une vraie menace pour les troupeaux et/ou les humains.

• Septembre 2023 : adoption de la révision de l’Ordonnance fédérale sur la chasse (OChP) qui autorise le tir préventif des loups en Suisse.

• Septembre 2023 : courrier de la Fondation Franz Weber (FFW) au Conseiller fédéral Albert Rösti pour attirer son attention sur le caractère antidémocratique et contraire à la loi de cette nouvelle OChP.

• 1er décembre 2023 : entrée en vigueur de la nouvelle OChP.

  Recours de Pro Natura et le WWF, notamment, contre les autorisations de tirs de loups délivrées par l’Office fédéral de l’environnement (OFEV) aux cantons des Grisons et du Valais.

• Décision du Tribunal administratif fédéral de suspendre les autorisations de tirs, durant la procédure de recours.

• Depuis décembre 2023, environ 50 loups, dont 2 meutes complètes, ont été abattus dans le cadre des tirs préventifs.

 

Position de la Fondation Franz Weber

En septembre 2023, au vu de la nouvelle OChP qui allait être adoptée par le Parlement, la Fondation Franz Weber (FFW) a adressé un courrier au Conseiller fédéral Albert Rösti, Ministre du Département fédéral de l’environnement, des transports, de l’énergie et de la communication (DETEC), et instigateur de la nouvelle ordonnance. Le but était d’attirer son attention sur le fait que l’OChP est contraire à la LChP et à la volonté populaire, puisque le peuple suisse avait refusé les tirs préventifs du loup en 2020, et d’obtenir un nouveau projet d’ordonnance, conforme au droit. La FFW relevait également que l’ordonnance a été adoptée sans que les milieux intéressés, dont les organisations de défense des animaux, aient été consultés. Le Conseiller fédéral n’a pas entendu les requêtes de la FFW.

La FFW estime que les tirs préventifs prévus par la nouvelle OChP sont extrêmement problématiques, tant du point de vue de la protection des animaux que de la démocratie helvétique. Bien qu’historiquement, notre fondation ne soit pas active dans la protection du loup en Suisse, nous estimons que la préservation de l’espèce, protégée au niveau national et par le droit international (Convention de Berne), doit primer. Dans cette optique, nous saluons les recours déposés par d’autres organisations de protection de la nature contre les autorisations de tirs délivrées par l’OFEV.

 

La confiance est rompue

Le référendum n’est pas possible contre les ordonnances du Conseil fédéral – et aucun recours n’est ouvert non plus. Autrement dit, le Conseil fédéral dispose d’un pouvoir impressionnant, et critiquable s’il ne se conforme pas à la loi (les lois fédérales peuvent, elles, être attaquées par la voie du référendum). Dans le cas de l’Ordonnance sur la chasse, dont la révision poussée par le Conseiller fédéral Albert Rösti est entrée en vigueur en décembre 2023, ce pouvoir s’est avéré problématique : alors que le peuple suisse avait rejeté les tirs préventifs du loup dans le cadre du référendum contre la Loi sur la chasse, le Conseil fédéral les réintroduit « par la petite porte », c’est-à-dire dans l’ordonnance.

On craint ainsi le pire, par analogie, en ce qui concerne la nouvelle loi sur l’électricité, sur laquelle nous voterons le 9 juin 2024 : le Conseil fédéral pourrait faire un usage large de son « pouvoir » et introduire, par exemple, des restrictions importantes aux droits démocratiques (suppression des référendums contre les projets éoliens/solaires) ou les droits de recours (procédures raccourcies ou accélérées, droits de recours des ONGs limité, etc.). La confiance a déjà été rompue une fois, et récemment… il n’est pas raisonnable de la reconfier aveuglément au Conseil fédéral en matière de production d’énergie !

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