08.05.2024
Matthias Mast

Détruire le paysage pour sauver le climat ?

La loi sur l’électricité veut notamment encourager la construction de parcs éoliens, au risque de défigurer notre paysage et de provoquer d’autres dommages environnementaux.

Dans un éditorial de la Frankfurter Allgemeine Zeitung, le politicien de gauche et ancien président du Parti social-démocrate d’Allemagne Oskar Lafontaine a formulé une mise en garde contre la construction accélérée de gigantesques éoliennes. « Sous le prétexte de protéger l’environnement, on détruit le paysage », déclarait-il. Selon lui, il était temps de mettre un terme à la production d’électricité par des « colosses d’acier » pouvant mesurer jusqu’à 200 mètres de haut. Il est vrai, admettait-il, que beaucoup voient dans l’énergie éolienne la technologie de l’avenir. Or cette « production d’énergie qui se veut écologique » détruit les paysages et renforce involontairement les centrales thermiques au charbon, qui sont parmi les plus polluantes.

Rétrospectivement, ces paroles écrites il y a plus de dix ans peuvent paraître prophétiques. En Allemagne, la consommation de charbon a connu une augmentation massive et la dégradation des paysages se poursuit.

Avec la nouvelle loi sur l’électricité et le « Windexpress », la Suisse, qui est à la traîne de l’Allemagne en matière d’énergie éolienne, veut elle aussi promouvoir et accélérer la création de grands parcs éoliens. On oublie cependant leurs effets négatifs et dommageables pour l’environnement, indépendamment de leurs avantages incontestés.

Outre les atteintes visibles aux paysages, il y a d’autres facteurs à prendre en compte. On citera notamment, sans prétendre à l’exhaustivité, les répercussions suivantes sur l’environnement :

  • Des animaux tués : les parcs éoliens représentent un danger mortel pour certaines espèces d’oiseaux, de chauves-souris et d’insectes. La station ornithologique de Sempach écrit à ce sujet : « Les incidences négatives des éoliennes sur les oiseaux sont attestées par plusieurs études scientifiques. » Les principaux risques résident dans le danger de collision avec les rotors, et la modification de l’habitat naturel.
  • Des éoliennes en forêt : la loi sur l’électricité veut faciliter la création de parcs éoliens dans les forêts. Détruire des arbres pour sauver le climat ? Ce n’est pas ce qu’on appelle une stratégie durable. La construction d’éoliennes dans les forêts endommagerait gravement ce précieux écosystème, restreindrait l’habitat de la faune sauvage et contribuerait en outre à réduire l’absorption du dioxyde de carbone, nuisible au climat.
  • Une production polluante : la construction d’éoliennes provoque « des dégâts environnementaux catastrophiques en Chine », a rapporté l’ARD (« Les sales dessous d’une énergie propre »). Pour rendre les parcs plus efficaces, on utilise du néodyme, un « élément de terres rares » produit presque exclusivement dans des mines chinoises. Son exploitation entraîne des « résidus toxiques » et libère de l’uranium et du thorium, métaux radioactifs. Ces substances ont fortement contaminé la faune et la flore et sont nocives pour l’homme.
  • Les éoliennes influencent le microclimat : une étude réalisée par des chercheurs de l’université de Harvard a montré que les températures enregistrent une hausse à proximité des parcs éoliens. Les répercussions directes des éoliennes sur le climat sont apparues immédiatement, tandis que les effets positifs, s’ils existent, ne se sont manifestés que lentement.
  • Ombres portées et projections de glace : les énormes rotors produisent de l’ombre dans les alentours des parcs éoliens, souvent associée à un effet stroboscopique analogue à celui d’une boule disco. Les habitants qui vivent à proximité ne sont pas les seuls à en être affectés, la faune en souffre aussi. Autre danger, les morceaux de glace, projetés parfois jusqu’à quelques centaines de mètres.
  • Un recyclage problématique : certains éléments des éoliennes sont difficilement recyclables ou seulement en partie. C’est le cas des rotors, fabriqués dans une matière plastique renforcée par de la fibre de carbone et de verre, mais aussi des socles massifs en béton. Les fondations d’un parc peuvent atteindre 3’500 tonnes de béton armé. En général, le démontage complet des installations n’est pas prévu, le matériel n’est enlevé que de façon superficielle, l’essentiel demeurant sur place.

On mentionnera également le bruit et les infrasons, qui affectent tant les hommes que les animaux. Rappelons que la Suisse n’est pas un pays venteux et qu’elle possède une nature et des paysages préservés, qui font partie de ses ressources les plus précieuses. Dès lors, une conclusion s’impose : l’installation de milliers d’éoliennes dans notre environnement réduit ne peut pas constituer une bonne solution.

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